jeudi 29 décembre 2011

Edouard De Beaumont, illustrateur Romantique (1).

Bonjour,

Aujourd'hui j'ai envie de vous entretenir d'Edouard de Beaumont, un artiste qui a passé son existence à dessiner des femmes, leurs relations entre elles et celles qu'elles ont avec les hommes. Son oeuvre est considérée par certains comme légère et d'importance secondaire, on l'a surnommé souvent le Gavarni du pauvre. En examinant un peu plus en détails toute sa production on s'aperçoit que de Beaumont tient une place plus qu'honorable parmi les illustrateurs de l'époque Romantique.



Pour commencer quelques éléments biographiques.
E. de Beaumont est né à Lannion en Bretagne le 6 Août 1819. Certains situent sa naissance deux ans plus tard en 1821 mais c'est bien cette date de 1819 qui figure sur son dossier de candidature pour la Légion d'honneur, décoration qu'il a obtenue en 1877, alors nous la tiendrons pour bonne.
Sa mère, née Jeanne Fromentin était d'origine Bretonne, son père Jean- Baptiste Beaumont qui aurait été un fils naturel du Prince de Condé était Picard ; la famille ayant, parait-il, formé son nom à partir d'un site nommé " Les Beaumonts"près de Chantilly. Pour l'anecdote on connait un charmant tableautin des parents fait en 1817 par le miniaturiste André Léon Larue.

Le Père était restaurateur de sculptures. Il a, entre autres, travaillé pour l'ancien Opéra de Paris et aussi pour Versailles.

Elevé  en région Parisienne dans un milieu familial artistique, E.de Beaumont laisse le souvenir d'un adolescent élégant, courant le guilledou et souvent épris. Il vivait une vie de bohème se prenant pour Almaviva, comme le raconte Charles Yriarte dans un article paru en 1888 dans la Gazette des Beaux-Arts.

Las des frasques, Jean-Baptiste fit rentrer son fils comme jeune apprenti dans l'atelier du peintre Antoine Félix Boiselier (1790-1857). Ses premières oeuvres furent des croquis des environs de Versailles. En 1838, âgé de 19 ans, il expose au Salon un paysage figurant Cernay. Il continue dans cette veine, exposant respectivement en 1839 et en 1840, une vue de Senlis puis une vue des environs de Chevreuse.

A cette époque Beaumont s'installe à Paris, avenue Frochot, dans un studio comme colocataire avec Eugène Isabey. Dans un autre local tout proche on trouve ses amis Isambert et Cham (de Nöé).
Les Mystères de Paris
Tout ce groupe de jeunes artistes s'intéresse à la lithographie, technique simple qui, profitant d'une large audience dans la presse caricaturale et populaire, permettait quelques rentrées monétaires bien nécessaires pour cette jeunesse bohême et impécunieuse. On travaillait aussi l'aquarelle. Beaumont, en 1841, reçut une offre pour illustrer les Mystères de Paris d'Eugène Sue. Bien que sa participation se soit limitée au tome IV, ce premier contrat fût suivi par bien d'autres.
Les Mystères de Paris
















Au cours de son existence Beaumont a contribué à d'autres oeuvres gravées sur acier comme dans Notre-Dame de Paris ( Perrotin, 1844) mais surtout à beaucoup de compositions gravées sur bois dans lesquelles on distingue : Les deux miroirs de Schmidt ( Royer, 1844), Les nains célèbres d'Albanès ( Havard, 1845),


Les bagnes d'Alhoy ( Havard, 1845), le Diable amoureux par Cazotte ( Ganivet, 1845), Les brigands et les bandits célèbres par Alhoy (Guilher, 1846), Ulysse ou les porcs vengés par Louis Huart (Garnier, 1852) et vers la fin de sa vie, en 1887 chez Jouaust, 120 dessins pour illustrer les aventures merveilleuses de Fortunatus.

Mais dans les années 1845, toute cette production ne suffisait pas pour assumer son train de vie et celui de sa maitresse de l'instant la belle Ninette qui habitait dans la rue Saint Jacques et qui attirait tous les regards des galants. De Beaumont "tapait" régulièrement un des ses oncles Bretons. Ce dernier, un peu excédé par les demandes de son neveu mit fin assez brutalement à sa générosité. Du coup, de Beaumont, impécunieux, ne pût continuer à entretenir Ninette et dût envisager la séparation. Ce qu'il tenta de faire élégamment dans un court poème sur les vicissitudes de l'amour. Ninette, vexée ou prosaïque, lui répondit : Zut ! et trouva un autre amant.


Beaumont lithographe a publié pendant 33 ans dans le Charivari, quotidien dont la parution journalière tournait autour de 2000 exemplaires. Dans ses dessins, toujours des femmes, des petites femmes, des Parisiennes, des gentils minois. Il disait qu'il avait beaucoup appris sur les femmes dans ses discussions avec les modèles qui posaient pour lui. Elles lui exprimaient leurs désirs, leurs espérances, leurs émotions intimes. Il aimait particulièrement la compagnie des jeunettes provinciales qui arrivaient dans la capitale, Rastignac en jupons. C'était pour lui une antidote à la soi-disant mélancholie que lui apportait la fréquentation masculine. Il faisait pourtant parti d'un cercle d'amis où on trouvait tout d'abord Alexandre Dumas fils et également Edmond About, Jules Chandelier, Eugène Isabey, Gustave Nadaud et bien d'autres qui étaient plutôt des joyeux drilles.


Sous toute la période du Second Empire, Beaumont a continué d'exposer des toiles au Salon et de peindre des aquarelles et également d'acheter des armes anciennes dont il était un collectionneur très averti. A son décès, il a fait un don testamentaire important d'épées médiévales au Musée de Cluny. Vers 1860, il quitta le phalanstère de la rue Frochot pour s'installer Faubourg Saint Honoré, puis résida ensuite Avenue de Wagram.  Il vendait correctement sa peinture;  2000 francs un Circé en 1867,  5000 Francs en 1868 une toile nommée " la Part du Capitaine", d'autres au même prix en 1870. Ses oeuvres furent récompensées par différentes médailles en 1870 puis en 1873, cette dernière pour " Ou diable l'amour va t-il se nicher ?". Devenu un artiste "notable", il fût fait chevalier de la Légion d'Honneur en 1877 et il rejoignit la Société des Aquarellistes en 1879.


Beaumont décède en 1888 d'un malaise cardiaque. Il laisse une oeuvre lithographique de plus de 1500 planches d'une importance majeure pour qui s'intéresse aux relations femme-homme dans la période Romantique.

Nous la verrons plus en détails dans un prochain blog.

Dans cette attente, Bonne année à tous.