mardi 21 février 2012

FARANDOLE DES FERS ORNANT GRANDVILLE

Bonjour,

Parmi les ouvrages à grand tirage de J.J.Grandville, pratiquement tous ont eu droit à une édition romantique, cartonnage percaline avec de fers dorés.

samedi 18 février 2012

Edouard de Beaumont et le rêve Romantique des Antipodes (5)

Bonjour,


Après quelques caricatures isolées publiées chez Bauger en 1842, Edouard de Beaumont a publié sa première suite lithographiques chez Pannier en 1843. Elle est très originale puisqu'elle concerne La Civilisation aux Iles Marquises. On peut se demander ce qui a poussé de Beaumont a traité un tel sujet fort décalé par rapport aux autres publications de l'époque. Si la conquête de l'Algérie commençait à inspirer par ci, par là, quelques dessins humoristiques, la Colonie ne faisait pas recette bien que l'immense succès du Paul et Virginie publié par Curmer faisait beaucoup rêver au paradis terrestre sous les cocotiers. Les Iles Marquises, initialement dans l'orbite d'influence Américaine venait en 1842 de devenir définitivement possession Française suite à l'expédition de l'Amiral Aubert du Petit-Touars. Dès cette époque, d'ailleurs Guizot, premier ministre envisageait de faire un lieu de déportation politique de ce bout du monde. Beaumont devait certainement ignorer cet avatar, les vingt deux planches de la série relevant plutôt d'une  transposition imaginaire des moeurs Parisiennes aux Antipodes. Le Bon Sauvage est confronté à la Mode, aux Impôts, lit le journal et va à la chasse comme en Sologne. On se réunit pour jouer du violon, voire à la belote, et des hommes en gibus font des négrillons. On exporte la modiste, le percepteur, le garde-chasse et mêmes les Lions des Boulevards si férocement croqués par Gustave Doré un peu plus tard. Sous prétexte de transmettre la civilisation cette féroce satyre des moeurs de l'époque est adoucie par un certain bonheur d'indolence propre aux iles.


On ne sais pas si cette série à fait rire et jaser mais on peut penser que Beaumont en choisissant un tel sujet avait cet objectif pour se faire connaitre du public.


Voici la description et légende des planches, résumé au titre pour celles que je ne possède pas. La série complète n'est pas monnaie courante.

Le Percepteur
N°1 (marquée 5). LE PERCEPTEUR DES CONTRIBUTIONS. Vous avez deux fenêtres à  cet appartement...à sept francs l'une cela nous fait quatorze francs....Voulez vous payer tout de suite ?...si cela vous gêne vous ne paierez que demain matin.

N°2. UNE LECON DE DANSE ET DE BELLES MANIERES. Allons , charmante Marquisienne...Vous avez deja la tenue d'une élégante...mettez à profit mes leçons et pour le balancé pincez moi un léger cancan;comme ceci... ensuite nous passerons à la Chaloupe orageuse...


N°3. JOUISSANCE DES DROITS POLITIQUES. "Une caricature sur la garde nationale".


Une Victime de la Mode
N°4. UNE VICTIME DE LA MODE. Mais...tailleur...il m'est absolument impossible de remuer bras ou jambe dans les vêtements que vous m'apportez là...--C'est ce qu'il faut...c'est justement ce qu'il faut...A Paris les gens riches ne s'habillent pas autrement...plus on est gêné dans ses habits et plus on passe pour être à son aise!


Le Mémoire de la Modiste
N°5. LE MEMOIRE DE LA MODISTE. Ce chapeau coiffe madame à ravir!...il est vrai qu'il a été confectionné à Paris...chez la première modiste du passage du Saumon...nous ne tenons des dépots que des meilleures maisons...125 francs c'est pour rien.
La lecture du Journal
N°6. LA LECTURE DU JOURNAL. ça n'est guère amusant le journal....je dirais même qu'il m'ennuie beaucoup!...--Mais aussi...mon cher Ta-Toué pourquoi diable lire Le Moniteur par vous-même, quand vous payez un domestique pour faire toutes les corvées!


N°7. UN CHASSEUR DESAPPOINTE. --Comment y faudrait que je prenne un port d'armes de quinze francs pour tuer un méchant moigneau de deux sous ?--Oui sauvage...et tu t'avises de tendre un lacet aux lièvres, c'est moi qui te prendrais au collet.
Les Bols d'eau chaude
N°8. LES BOLS D'EAU CHAUDE. Vous ne connaissez pas encore ici l'usage des bols...à paris depuis longtemps dans les grandes maisons tout le monde se rince la bouche après diner, et se lave les mains...comment trouver vous cet usage mon cher Ta-Ti-Toué ?--Je le trouve aussi distingué que malpropre!...
si vous aviez les mains sales, je crois que vous auriez mieux fait de les laver avant de vous mettre à table!


N°9. UN APPRENTI  LION. Je suis content de vous, mon cher ami, il ne me reste plus qu'à vous apprendre, à bien porter votre canne dans votre poche, car c'est surtout en portant sa canne dan sa poche, qu'on parvient à donner dans l'oeil à toutes les femmes qu'on rencontre!


N°10. UN MARI VEXE. --Malheureux! qu'allez vous faire ?...--Parbleu! une volée à l'amant de ma femme...--Ce serait vous perdre de réputation...suivez la mode européenne, envoyez un cartel à votre rival...demain matin vous irez sur le terrain...ce monsieur vous brûlera la cervelle...et au moins vous eu complète satisfaction.


N°11 (marquée 1). UNE INSTRUCTION DIPLOMATIQUE. Vous partez pour les Iles Marquises, monsieur le commandant. eh bien, je n'ai qu'une recommandation à vous faire : tâchez de civiliser les hommes et de rendre les femmes plus sauvages.
Un Solo de Violon
N°12. UN SOLO DE VIOLON. Il paraît que j'impressionne bien vivement mes auditeurs, car je ne les entends pas bouger!
La Charade
N°13. LA CHARADE. --EH bien! mon ami...tu ne travailles donc pas aujourd'hui ? ...--Comment je ne travaille pas ! voilà plus de cinq heures que je suis sur cette charade...je ne peux pas trouver le mot mais bien certainement je ne dinerais pas avant d'avoir fini ma besogne!


N° 14. L'ORIGINE D'UNE ETYMOLOGIE. Dites moi coiffeur...
Un fruit de la Civilisation
N°15. UN FRUIT DE LA CIVILISATION. --C'est étonnant comme mon petit dernier à la peau blanche!...--Oui, je vois avec plaisir,que c'est déjà un fruit de la civilisation Française!


N°16. LE CHAPEAU GIBUS.
Un coup de Soleil
N°17. UN COUP DE SOLEIL. --Soutiens-toi donc, moricaud...nous aurions l'air d'être gris...--C'est singulier...t'avais dit que le vin monte à la tête et je trouve qu'y me descend seulement les jambes!


N°18. DE QUOI! DE QUOI! IL M'A ROSSE.


N°19. MADELEINE CIVILISANT.


Le Cigare
N°20. --Vous m'aviez assuré que j'éprouverais beaucoup d'agrément et j'éprouve comme qui dirait un commencement de mal de mer....--Vous vous y ferez, sauvage, vous vous y ferez, vous serez malade comme ça pendant six mois... mais à partir du septième, vous n'aurez plus que mal au coeur!
Le Combat de Boxe
N°21. --Oh! là là....oh! là là...vous m'avez crevé l'oeil! --Ce n'est rien...ce n'est que le commencement demain nous passerons au fameux coup de poing de la fin inventé par mon confrère Eugène Süe. Cette fois je viserais à la mâchoire, c'est le moyen le plus sûr pour mettre son adversaire sur les dents.


La Partie
N°22. Le sauvage : Pourquoi donc que j'ai toujours tous les noirs, tandis que vous avez toujours tous les blancs ? Le 1er Marin : C'te bêtise ! les blancs viennent à moi parcequ'ils me reconnaissent, et les noirs vont à vous parce que ce sont vos frères.....C'est une question de couleurs. Le 2ème Marin : Elle est bonne la couleur !


Rien n'échappe au crayon acerbe de Beaumont : Le très discuté impôt sur les fenêtres, le ridicule des Modes, les contraintes fiscales des chasseurs, les abus du tabac, les rapports des hommes et des femmes...C'est à notre connaissance, la seule série de lithographies entre 1830 et  l'avénement du Second Empire qui utilise le thème des noirs pour faire passer la critique societale.  Des années plus tard Cham dans ses innombrables "Actualités" et autres albums reprendra la même veine.


C'est en 1850 seulement que les premiers politiques sont déportés aux Marquises. Condamnés par la Haute Cour siégeant à Bourges, Armand Barbès et Louis Blanc se retrouvent dans un premier temps à Nuku Hiva. Ils seront rejoint en 1852 par plusieurs opposants au coup d'Etat du 2 Décembre 1851.


Plus tard les autres habitants célèbres des Marquises furent Paul Gauguin et plus près de nous Jacques Brel. Ils sont enterrés dans des sépultures proches au cimetière d'Atuona  à Hiva Oa.


Bonsoir.